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17 janvier 2018 3 17 /01 /janvier /2018 17:54

 

 

 

We're pretty fuckin' far from okay

 

Conception et chorégraphie : Lisbeth Gruwez

 

Composition, son et assistanat : Maarten Van Cauwenberghe

 

Avec Lisbeth Gruwez et Wannes Labath

 

 

 

 Avec son thème clairement défini, "We're pretty fuckin' far from okay" a tout l'air d'être un spectacle programmatique, avec ce que cela suppose de développement attendu d'une intention annoncée. Pourtant, dans un second temps, et sachant que l'on a affaire à une chorégraphe, la seule interrogation sur la manière dont elle va aborder la représentation de la peur sur scène suffit à lever tous les à-priori.

 

 Il faut en effet de peu de temps pour comprendre qu'avec "We're pretty fuckin' far from okay", on tient une œuvre singulière, moins fondée sur la démonstration que puissamment suggestive, complètement fuyante par rapport à son annonce. Car si la peur est en soi teintée d'irrationnel, Lisbeth Gruwez en propose une exploration fine.

 

 Assis sur deux chaises, de part et d'autres de la scène, à une distance certaine l'un de l'autre, Lisbeth Gruwez et son partenaire Wannes Labath sont présents bien avant le début du spectacle. Immobiles, leur présence revêt plutôt un caractère fantomatique, et ce n'est pas le début de la pièce, une fois la lumière éteinte, qui l'engage vers une expression affirmée. Dans "We're pretty fuckin' far from okay", l'alliance des corps et du son est la marque principale tissant une tension très progressive, au départ totalement impalpable. C'est d'abord par le souffle que se manifeste un son léger chez les deux performeurs, à mesure que se dessine enfin des velléités de mouvement à peine perceptible. A tel point que cette respiration, de lente, avant de devenir haletante, semble se détacher des corps autant qu'elle semble en émaner.

 

 C'est que, dès cette entame, le travail sonore de Maarten Van Cauwenberghe atteint un degré de subtilité tel que les corps ne pourront plus avancer sans être baigné dans l 'écrin qu'il a tissé. Et dès lors que le corps de Lisbeth Gruwez et Wannes Labath, accrochés à leur chaise, se lancent dans cette représentation de la peur, c'est à un spectacle véritablement électrique auquel on assiste. Moins conçue comme danse dans son expressivité chorégraphique que tentative d'incarnation fébrile, la prestation étonne par la vivacité qu'elle atteint. Fi de l'immobilité inaugurale, les corps se livrent à un précipité de gestes vifs secs, de frottements des membres, de regards éperdus, comme en recherche d'une respiration salutaire visant à conjurer la peur.

 

 Dans cette dépense échevelée, Lisbeth Gruwez impressionne réellement, elle qui par sa silhouette mince, donne l'impression d'engager chaque geste vers un point de rupture, tant la rapidité et le caractère survolté se mêlent intimement. Il y a surtout, dans ces mouvements rapides, une fluidité incomparable que Wanna Labath peine à suivre, quand bien même sa prestation est essentielle aux côtés de la chorégraphe. Avec l'intensité sonore à laquelle on parvient dans "We're pretty fuckin' far from okay", le minimalisme initial semble bien loin, laissant la place à une rayonnante performance.

 

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