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13 novembre 2010 6 13 /11 /novembre /2010 16:00

 

 

 

 

 

 

En présence d'un clown

 

Film de Ingmar Bergman (1998) 

 

Avec  Börje Ahlstedt, Marie Richardson, Erland Josephson

 

 "En présence d'un clown" fait partie des films de Bergman tournés pour la télévision, dont il n'envisageait pas d'exploitation cinématographique. Heureusement, il nous a été donné d'en découvrir, comme "Après la répétition" ou le superbe "Sarabande". Produit hybride, en plus d'être destiné à la télévision, "En présence d'un clown" était une pièce de théâtre. Mais on a vite fait, installé dans son siège de cinéma, d'évacuer ce parcours pour considérer cet objet déposé sous nos yeux treize ans après sa réalisation. La découverte des premières images de Carl, un ingénieur interné pour accès de violence envers sa jeune fiancée Pauline, peut laisser craindre un climat étouffant et morbide digne de "Cris et chuchotements".

 

 D'entendre d'entrée de jeu Carl égrener sur un piano les premières notes du lied "Der leiermann" (le croque-mort) installe d'emblée le climat dans lequel on va évoluer : l'articulation constante entre l'art et la mort. Pour autant, ces impressions funestes sont très vite déjouées, ne serait-ce que par l'arrivée du clown qui donne son titre au film. Réactualisation de la figure de la mort dans "Le Septième Sceau", elle se présente cette fois-ci sous une forme totalement triviale, vieillie, mais d'autant plus incarnée. Sa première apparition prend un tour véritablement grivois, puisqu'elle dévoile ses seins et se penche pour un acte érotique osé.

 

 Le tragique, évacué, fait place  à un grotesque qui, loin d'affadir les personnages, les rend au contraire touchants. Carl, porté par une indéfectible envie de reconnaissance, est pourtant dans une phase de régression infantile. Le voir sortir de sa chambre soutenu par une infirmière et un oreiller sur l'arrière train pour comprimer une envie le rend plus humain que ridicule. La violence, qui pourrait être le moteur d'une tension fictionnelle, est elle aussi hors champ ; elle a déjà eu lieu. Les relations entre les personnages, de leur tension initiale, basculent vers un espace de reconstruction. 

 

 Tout ce qui est de l'ordre du découragement se renverse pour être inscrit dans une dimension artistique. Carl, dans sa détermination brouillonne, pourrait faire sien l'aphorisme de Nietzsche : "Nous avons l'art pour ne pas mourir de la vérité". Sa passion pour Schubert le conduit dans un premier temps à tourner un film sur la fin de sa vie et, devant cet échec, à le transformer en pièce de théâtre. Un vrai suspense se crée par ailleurs avant la projection en petit comité, le projectionniste se mettant à cracher son sang, mais réussissant à lancer le film. "En présence d'un clown" est mû par une réelle énergie qui réunit, le temps d'une soirée, des personnages aux yeux émerveillés comme des enfants.

 

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