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5 avril 2011 2 05 /04 /avril /2011 15:00

 

 

 

Shashank, flûtes murali

 

Parupally Phalgun, mridangam ; Satyajit Tawalkar, tabla

 

 

 Pour sa troisième venue au Théâtre de la Ville, le flûtiste de l’Inde du Sud Shashank est accompagné de deux percussionnistes : Parupally Phalgun, au mridangam, tambour tenu horizontalement, emblématique de la musique carnatique (Sud de l’Inde) et Satyajit Tawalkar, au tabla, instrument désormais célèbre en Occident, dont l'interprète le plus renommé actuellement reste Zakir Hussain, fils d’Alla Rakha, longtemps accompagnateur de Ravi Shankar. Il semblerait que Shashank, dans sa maturité de musicien en quête d’évolution, inaugure des formations à géométrie variable, comme d’autres avant lui, dont le grand violoniste Subramaniam. Il partage avec lui, dans le concert du 4 Avril, le fait de ne pas utiliser de soutien au violon. Anecdote suffisamment amusante pour le noter : le nom complet du flûtiste est... Subramanyam Shashank. A croire qu'il ne voulait pas faire de l'ombre au violoniste ami de Yehudi Menuhin.

 

 Comme il semble loin, ce premier concert de Shashank, en Avril 2005, aux Abbesses. Ce qu’il a proposé alors au public ne semble presque plus possible : après deux heures trente d’une prestation époustouflante, il s’était à nouveau assis, comme un élève poli sommé par les applaudissements tonitruants de continuer de nous ravir. Mais le retour à la triste réalité d’une salle parisienne s’était opéré par une forme en coulisse venant lui signifier qu’il était temps de rompre le charme. Il s’était alors relevé pour définitivement saluer le public. Ce miracle n’aura pas lieu dans ce troisième concert, pas plus qu’il ne s’était réitéré, deux ans plus tard, dans la grande salle place du Châtelet, en compagnie de Shahid Parvez, grand sitariste, neveu du regretté Vilayat Khan. Ce fut un très bon concert. Un de plus au Théâtre de la Ville, où sont passés de si grands interprètes.

 

  Ecarté donc, dans ce concert, l’accompagnement, souvent savoureux dans la musique du sud, du violoniste qui reprend les lignes mélodiques du soliste. Ecarté aussi le tampura, gros instrument habituellement positionné en retrait du soliste, qui produit une sorte de mélodie répétitive, un bourdon, tapisserie sonore sur laquelle le soliste s’appuie pour improviser, jusqu’au développement plus tardif. Ecarté le tampura comme instrument, mais bienvenu au son du tampura restitué par un… ordinateur portable placé à la droite de Shashank. On veut croire que cette substitution insolite est essentiellement liée à des problèmes de transport d'un matériel encombrant.

 

 Si la présence de l'ordinateur portable étonne, l'oeil de l'amateur se braque peu à peu sur la série de flûtes alignées sur le tapis, à la gauche de Shashank. De différentes longueurs, d'épaisseurs, émettant des sonorités allant du plus aigu au plus grave - au point de rappeler le timbre de la flûte bansuri du Nord, rendue célèbre par Hariprasad Chaurasia -, leur utilisation dans un même concert contribue à la notoriété de Shashank.

 

 Cette multiplicité de flûtes fait de Shashank un peintre de la musique carnatique (Sud de l'Inde). Ses flûtes sont ses pinceaux grâce auxquels il enrichit sa palette sonore. Il offre, par ces changements, incessants mais homogènes, une richesse de timbre assortie d'une technique vertigineuse. Là où la musique du Nord est beaucoup plus axée sur de longs développements méditatifs, la carnatique est plus directement rythmique, ce qui, avec Shashank, nous met de plein pied dans ce bain sonore vertigineux. Cependant, avec le raga "Purya Kalyan",  pièce maîtresse du concert, Shashank s'astreint à cet exercice de développement progressif, auquel il est familiarisé de par sa fréquentation de la musique du Nord. Cette aisance tient au fait qu'il a fait son apprentissage avec notamment Pandit Jasraj, grand chanteur de la musique hindoustanie. 

 

 Les morceaux de bravoure du soliste ne trouvent de respiration que par le duo obligé des percussionnistes. Dans ce dialogue conduit par le joueur de mridangam,  aux frappes puissantes et sèches, c'est le tablaïste qui met en jeu les nuances percussives les plus fines.

 

 Après "Purya Kalyan", Shashank annonce le raga "Sindhu Bhairavi", morceau typique de la musique hindoustanie du Nord censé terminer un concert - déjà interprété sur la scène du Théâtre de la Ville par Hariprasad Chaurasia. Cette fois-ci, on est certain qu'il n'y aura pas de réédition de sa prestation de 2005. Pourtant, avec sa générosité manifeste, Shashank enfreint cette convention pour proposer un dernier court morceau, quand la salle commençait déjà à se vider. Générosité qui exprime la promesse d'un retour en ces lieux.  

 

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