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24 septembre 2012 1 24 /09 /septembre /2012 10:06

 

 

 

Une nuit balinaise : danseurs et musiciens de Sebatu

 

 

 Il faut sans doute remonter en 1998 pour retrouver un spectacle de l'ampleur de celui présenté au Théâtre national de Chaillot : à l'Odéon, était proposé alors "Bali : danses de drame", composé de trois parties également. La structuration du spectacle se fondait sur le même moment nostalgique, lorsqu'en 1931, Antonin Artaud découvrait ébahi, à l'Exposition coloniale, une troupe venant du village de Péliatan, et en rendit compte dans un texte repris dans "Le théâtre et son double".

 

 Cette fois-ci, la troupe en question, venue du village de Sebatu, propose un spectacle que l'on qualifierait de complet si on n'avait pas l'impression, au bout de 3h30 et deux entractes, d'en être resté à une simple approche, tant la variété et la qualité des parties proposées reste vertigineuse.

 

 Il n'y a pas pour autant de frustration à ne voir qu'une série d'exemple de la multitude des spectacles proposés par cette troupe. Au contraire. S'il y a un ciment qui unifie de manière magnifique cette "nuit balinaise" (vue un dimanche après-midi), c'est bien le gamelan - cet orchestre de lamellophones - qui l'assure. On ne dira jamais assez à quel point cette musique, qui a fasciné des musiciens de renom - dont Claude Debussy dans certains morceaux pour piano - conserve une puissante attraction.

 

 Munis de leur mailloche, les musiciens, alignés des deux côtés de la scène, instaurent un dialogue fondé sur la résonance magnétique de notes : à droite, initié par un chef aisément repérable, les instruments produisant les sons les plus aigus, portant les mélodies à un niveau époustouflant, assurent la virtuosité rythmique. A gauche, la partie instrumentale dévolue aux sons les plus graves, au sein desquels se glissent les douces mélodies d'un flutiste, installe une dynamique plus régulière où résonnent les rythmes effrénés d'un percussionniste assis. Le génie rythmique peu commun de la musique balinaise ne cesse au fond d'interroger la singularité  de cette île hindouiste, nichée dans le plus grand pays musulman au monde.

 

 Penser que le gamelan balinais est d'origine javanaise, et confronter leur singularité musicale (l'une lente, austère, progressive ; l'autre axée sur une variété de timbres, de variations rythmiques sans pareil) en dit long sur l'éternelle étincelle apportée par cette petite île.

 

 Dans cette série de prestations remarquable, à côté du fameux et toujours réjouissant "Legong Kraton", on donnera une mention spéciale à l'extrait du "Ramayana", autour de l'enlèvement de Sita par le démon Ravana, épisode désormais connu en Occident. Les seuls masques, figurant notamment des personnages maléfiques (comme Ravana) ont un caractère horrifique impressionnant. Une poésie certaine se répand sur le plateau quand apparaît un comédien affublé d'un costume de biche. Le réalisme de la posture, au milieu de toutes ces figures aux masques expressionnistes, prend un relief savoureux.

 

La dernière partie - qui aurait pu aussi bien être la première - invite à la découverte du gambuh, le style originaire du théâtre musical balinais. Plus sobre, plus tempéré, il a l'allure austère du théâtre indien tel le kathakali. Peut-être aurait-il été préférable de le faire figurer au début de ce spectacle fleuve, afin de maintenir l'attention du spectateur de manière graduelle, pour en finir avec le feu trépidant des percussions. Mais on sort tout de même de la salle les oreilles remplies de sonorités.

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