Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
8 décembre 2021 3 08 /12 /décembre /2021 17:47

Avec "Stations", la chorégraphe et danseuse canadienne Louise Lecavalier signe un spectacle où la virtuosité se mue en rêverie espiègle.

 

 

 

Stations

 

Chorégraphie et interprétation de Louise Lecavalier

 

 

 Nommé « Stations », le titre du dernier spectacle de Louise Lecavalier ne manque à priori pas d'intriguer, au regard de ce qu'on y voit. Dans la langue française, le mot renvoie surtout à une immobilité, à un point d'ancrage dans l'espace, à une circonscription précise. L'expression, vu du côté canadien, n'est peut-être qu'un faux ami. Mais il ouvre notre imaginaire, en évoquant une destination plus lointaine, le Japon, où l'expression « stations » se réfère à de célèbres estampes, notamment du peintre Hiroshige (« 53 stations du Tokaido »). Il s'agit véritablement d'une traversée du paysage japonais, et les stations représentent proprement les lieux parcourus.

 

 Le moindre que l'on puisse dire, c'est que le cœur de la pièce n'est pas lié à un quelconque statisme. On peine à imaginer Louise Lecavalier, danseuse à la virtuosité époustouflante, se lancer dans une danse méditative, lente. En ce sens, la signification orientale de « Stations » prend ici tout son sens : passer d'un point à un autre de l'espace, jusqu'à s'offrir une pause, quelques moments d'arrêt.

 

 Composée de quatre parties, les « Stations » se distinguent d'emblée par leur unité graphique : Louise Lecavalier, vêtue de noir, dans une scénographie faisant la part belle à une ambiance sombre. Le socle de sa danse, renforçant cet équilibre, repose sur ses mouvements des pieds qu'elle effectue, de petits glissements secs et vifs d'un bord à l'autre de la salle. Avec cette stature limpide et virtuose qui la caractérise, cette base dynamique est le prétexte à inventer perpétuellement des gestes. Ce sont les bras qui les assurent, à la fois exécutés dans un périmètre réduit du corps, puis, soudain, plus ample. Les bras ouvrent l'espace, comme pour dialoguer avec on ne sait quelle mystérieuse force, comme pour aller brasser dans l'air une énergie diffuse pour la redistribuer dans l'espace intime dans lequel elle s'exprime.

 

 Cette inventivité, mêlée d'accents parfois espiègle (remonter un soutien-gorge, passer les mains sur la tête) rend la dynamique chorégraphique de Louise Lecavalier inaltérable. A croire que c'est dans les pauses jalonnant le spectacle qu'il faut chercher une compréhension plus humaine : qu'elle s'arrête pour rester sur une jambe, tendre les bras où s'allonger par terre aux quatre coins de la salle, on a le sentiment de se trouver face à des gestes qui participent d'une communion avec l'invisible, ou d'une posture quelque peu méditative, à la limite du cérémoniel. C'est dans ces moments spécifiques, conçus comme des stases, des points d'arrêt, qu'il faut voir dans « Stations » une quête profonde de la justesse chez une danseuse chevronnée.

 

Partager cet article
Repost0

commentaires

Blog De Jumarie Georges

  • : Attractions Visuelles
  • : Cinéma, théâtre, danse contemporaine, musique du monde, voyages
  • Contact

Recherche